ASTM, l'ONG Fairtrade Lëtzebuerg et Greenpeace demandent une reconnaissance rapide du droit à un environnement propre, sain et durable
À l’occasion de la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’Europe, l’ASTM, Fairtrade Lëtzebuerg et Greenpeace appellent le gouvernement à prendre la direction politique nécessaire et à s’engager pour l’adoption rapide d’un protocole additionnel juridiquement contraignant à la Convention européenne des droits de l’homme reconnaissant le droit à un environnement propre, sain et durable. Les organisations, signataires d’un appel lancé par 450 organisations de la société civile, mouvements sociaux et organisations de peuples indigènes, ainsi que par plus de 200 scientifiques [1], regrettent que cette question urgente ne figure pas parmi les priorités de la présidence luxembourgeoise, alors que la crise environnementale — notamment le dérèglement climatique, la perte de biodiversité et la pollution — menace les droits humains à une échelle sans précédent. [2]
ASTM, Fairtrade Lëtzebuerg et Greenpeace déplorent le manque d’ambition du gouvernement sur cette question importante. Ainsi, à l’exception d’une conférence, rien dans le programme de la présidence luxembourgeoise [3] n’indique que le gouvernement entend faire de la protection du droit à un environnement propre, sain et durable une priorité au niveau européen. Pour la conférence en question, qui se tiendra vendredi prochain à l’Abbaye de Neumünster dans le cadre d’un événement privé d’une journée et qui sera consacré au rôle des parlements nationaux dans la protection du droit à un environnement sain, les représentant·es de la société civile luxembourgeoise n’ont pas été invité·es à participer aux différentes tables rondes.
Le Luxembourg n’assume pas sa marge de manœuvre
Étant donné l’urgence de la situation, le Luxembourg aurait pu endosser le rôle de chef de file et profiter de sa présidence pour franchir un pas décisif dans la reconnaissance de ce droit à un environnement durable. L’absence de la société civile et des organismes de défense des droits humains aux tables rondes, alors qu’un représentant de l’économie y a été convié, est révélateur de la tendance au « business first » qui se répand malheureusement de plus en plus au Luxembourg.
La non-reconnaissance du droit à un environnement sain dans la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) constitue une lacune importante. Avec plus de 300 affaires liées à l’environnement, la CEDH a clairement développé une expertise dans le domaine. Comme le montrent les récents arrêts de la Grande Chambre, notamment dans le cadre de la plainte de l’association KlimaSeniorinnen Schweiz contre la Suisse, il ne fait aucun doute que la Cour continuera à s’occuper, de plus en plus, des conséquences de la dégradation de l’environnement. Cependant, la jurisprudence croissante de la Cour reste fondée sur une série d’autres droits qui n’ont été développés qu’indirectement et sur une base ad hoc. Un protocole additionnel permettrait de garantir que la jurisprudence de la Cour soit cohérente et consolidée, et permettrait de mettre la Convention en conformité avec ses principes fondamentaux tout en renforçant son efficacité.
Le droit à un environnement propre, sain et durable est un droit humain à part entière. La nécessité d’un instrument juridique contraignant fait l’objet de discussions au sein du Conseil de l’Europe depuis plusieurs décennies. Bien qu’une nette majorité (42 sur 46) des États membres du Conseil de l’Europe reconnaisse ce droit au niveau national, des différences subsistent et témoignent d’une protection inégale.
En 2022, les 46 États membres du Conseil de l’Europe, dont le Luxembourg, ont reconnu ce fait dans une résolution de l’ONU. [4] Lors du sommet de Reykjavik en 2023 [5], les chefs d’État et de gouvernement des 46 États ont promis de poursuivre ce travail au sein du Conseil de l’Europe. Pourtant, le Conseil de l’Europe reste à la traîne : il est le seul système international des droits humains au monde à ne pas avoir reconnu le droit à un environnement sain de manière juridiquement contraignante. Les législations régionales en matière de droits humains tout particulièrement interaméricaines et africaines, ont déjà pleinement mis ce droit en œuvre.
Notes :
[1] Appel à l’adoption d’un protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme sur le droit à un environnement propre, sain et durable – Aux ministres des Affaires étrangères et aux Représentants permanents des États membres du Conseil de l’Europe https://healthyenvironmenteurope.com
[2] Nous vivons dans un monde qui souffre d’une dégradation croissante de l’environnement : on estime que près de 7 millions de personnes dans le monde et plus de 300 000 rien qu’en Europe meurent chaque année des suites de la pollution atmosphérique. Les inondations extrêmes, les vagues de chaleur prolongées, les incendies de forêt et les sécheresses croissantes sont de plus en plus fréquents en raison du changement climatique, et le groupe de scientifiques le plus important au monde a averti que des mesures globales, coordonnées et urgentes devaient être prises au cours de la prochaine décennie afin d’éviter les effets encore plus catastrophiques d’une augmentation de la température de 1,5°C ou plus. Des écosystèmes entiers s’effondrent, ce qui a des répercussions sur la sécurité alimentaire et l’accès à l’eau, affaiblit la résilience des communautés et laisse aux générations futures un monde appauvri.
[4] UN-Res/76/300 : https://digitallibrary.un.org/record/3982508?ln=en&v=pdf#files